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Analyse : l’injustice est le mal suprême

Par Roger KAFFO FOKOU, Secrétaire Général du SNAES

Il est des vérités qui nous viennent du fond des âges et nous arrivent odorantes et puissantes comme fraîchement cueillies. « La justice renferme toute vertu », dit Théognis à la fin du VIè siècle avant notre ère. Cette phrase met en exergue le concept de justice et le définit comme la source de tout bien. Or l’on sait que pour Platon, le vrai, le beau et le bien se confondent. Et si la justice est la vertu suprême, celle qui renferme toutes les vertus c’est-à-dire la perfection, alors l’injustice est le vice suprême, celui qui renferme tous les vices, en un mot le mal absolu. Il est vrai, la justice comme idéal est insaisissable et peut-être n’existe-t-elle pas tout simplement. Le besoin profond et viscéral de justice que l’homme éprouve a cependant amené les sociétés à codifier un ensemble de normes positives qu’elles se sont imposées au nom de cet idéal : la nature a horreur du vide. A défaut donc d’une justice tombée du ciel, les hommes ont créé par eux-mêmes leur divinité de justice devant laquelle ils ont tous l’obligation de se prosterner. Ainsi conçue, la justice se confond avec le droit, subjectivement ou objectivement.


Ramenée au niveau d’un Etat, la justice comme droit est à la base de ce que l’on appelle l’Etat de droit qui n’est autre qu’un Etat qui fonde son action sur des règles de droit c’est-à-dire sur ce qui est admis collectivement comme juste. Et comme ces règles de droit sont instituées par l’ensemble du corps social à travers ses représentants, elles seules tracent les limites au-delà desquelles le juste devient injuste. L’Etat de droit, celui qui respecte le droit qu’il s’est librement donné, seul cet Etat est juste aux yeux de sa population, donc légitime. Or l’Etat est incarné par l’ensemble de ceux qui le dirigent d’une part, d’autre part par l’ensemble de ceux qui y sont gouvernés c’est-à-dire la population. Chacun de ces deux entités a le devoir, par fidélité pour l’Etat qu’ils incarnent tous, de lutter pour le respect des règles qui font de cet Etat un Etat de droit, c’est-à-dire un Etat légitime, un Etat qui se refuse à céder à la pression de l’injustice. En principe, tout Etat aspire à devenir toujours plus juste, donc toujours plus légitime. Pour cela, l’injustice, quand elle émane des individus ou de groupes d’individus, doit être combattue par l’Etat ; quand elle émane des institutions de l’Etat, elle est une trahison, une félonie, et doit être combattue par le peuple.


La Constitution de la république du Cameroun en son préambule dispose que le peuple camerounais « affirme sa volonté inébranlable de construire la patrie camerounaise sur la base de l’idéal de fraternité, de justice et de progrès ». Elle ajoute que ce peuple est « résolu à exploiter ses richesses naturelles afin d’assurer le bien-être de tous en relevant le niveau de vie des populations sans aucune discrimination ». En instituant la pratique des rémunérations discriminatoires, l’Etat camerounais trahit donc l’idéal républicain contenu dans sa Constitution. Face à cette situation et sous peine de forfaiture, le peuple doit assumer sa part de responsabilité et se lever pour défendre l’Etat de droit, au nom de cet idéal républicain de justice et de progrès. Un tel engagement, auquel nul n’a le droit de se soustraire, n’est rien d’autre que la proclamation de cette vérité simple qu’il n’y a pas d’Etat de droit sans respect du principe de justice, et que seule la justice, appliquée également à tous, confère aux yeux de tous une légitimité indiscutable à l’Etat.



19/01/2012
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