Ascension de la Chine : la politique des petits pas gagnants
En quelques années, la Chine est devenue l’une des économies les plus puissantes du monde, la deuxième après les Etats-Unis. Entre les deux économies cependant, le fossé reste encore très grand : le PIB de la Chine, établi fin 4è trimestre 2011 à 5880 milliards de dollars, n’est pour l’instant que le tiers de celui des Etats-Unis (15198,6 milliards de dollars). Cette distance se comble toutefois très rapidement en raison de la différence dans les taux de croissance économique entre les deux pays, celui des Etats-Unis, établi à 1,3% au deuxième trimestre 2011, n’étant que le 1/7è de celui de la Chine. L’écart entre les Etats-Unis et la Chine devrait continuer à se réduire rapidement dans les conditions actuelles. Aussi les deux puissances se battent-elles pour modifier lesdites conditions chacune à son avantage.
Du côté des Etats-Unis, l’impératif est de conserver les armes qui lui ont permis de dominer l’économie mondiale depuis la fin de la deuxième guerre mondiale : malgré une monétisation inquiétante de sa dette, les Etats-Unis ont su conserver le dollars comme seule monnaie de réserve internationale ; les pressions en vue de la modification des équilibres de pouvoir au sein du FMI et de la Banque mondiale sont restées vaines (malgré le soutien forcené de Nicolas Sarkozy pour lequel les marchés occidentaux doivent lui en vouloir sérieusement) ; l’entrée de la Chine à l’OMC reste repoussée à 2016 en attendant mieux ; les Etats-Unis ont rejoint le Trans-Pacific Partnership, aussi connu sous le nom de Trans-Pacific Strategic Economic Partnership Agreement en 2010 et depuis lors, ils essaient de transformer cette organisation réunissant pas moins de douze pays américains et de l’Asie du sud-est (Bruneï, Chili, Nouvelle-Zélande, Singapour, Australie, Malaisie, Pérou, Etats-Unis, Vietnam, Canada, Japon et Mexique) en une plateforme pour contrer les ambitions de la chine en Asie et dans le monde. Subsidiairement mais de manière significative, les Etats-Unis essaient autant qu’ils le peuvent d’encourager la contestation sociale et la dissidence politique en Chine, au Tibet par exemple (la cause du peuple tibétain pourrait avoir un regain d’intérêt international dans les années à venir). L’intérêt de l’académie Nobel pour la Chine et le continent asiatique est remarquable ces dernières années.
De son côté, la Chine renforce sa position dans l’économie occidentale, ce qui lui permet d’améliorer constamment sa position de négociation au plan international. Malgré les pressions et les menaces américaines, la Chine n’a fait évoluer sa politique monétaire (le maintien d’un yuan faible ou sous-évalué) qu’en fonction de ses propres intérêts. Elle s’est engagée dans une politique d’internationalisation à petits pas de sa monnaie. Dans un premier temps, elle s’est appuyée sur des pays ouvertement hostiles au leadership américains comme le Venezuela. Récemment, la Chine a encouragé l'utilisation du yuan pour ses échanges avec des pays voisins, notamment en Asie du Sud-est, et a procédé à plusieurs émissions d'obligations d'Etat à Hong Kong. En fin 2011, la Chine et le Japon (donc la deuxième et la troisième économie mondiale) ont décidé d’encourager l’usage du yuan dans leurs transactions économiques. Ce pont-là, le premier entre le yuan (monnaie émergente) et un pays du nord, représentait en fait une percée significative. Déjà en juillet 2011, Les Circuits de l’Economie (LCE) annonçait que « La deuxième économie mondiale a commencé à autoriser les entreprises étrangères à utiliser le yuan pour investir dans le pays, selon un document de la banque centrale chinoise cité mercredi par la presse. Les investisseurs étrangers pourront utiliser le yuan pour financer des implantations, des fusions- acquisitions, des augmentations de capital ou prêter de l'argent aux actionnaires de l'entreprise, précise le Diyi Caijing Ribao (China Business News) ». En ce début 2012, à l’occasion de la visite du chancelier de l’échiquier britannique à Hong-Kong, un autre pas, encore plus significatif, vient d’être fait : le yuan va bientôt fouler le saint des saints, la City de Londres, l’une des plus importantes places financières du monde. Comme l’annonce Florentin collomp dans le Figaro.fr du 16 janvier 2012, « La City se prépare à abriter le premier marché en Occident de produits financiers libellés dans la devise chinoise. C'est l'un des éléments de coopération économique entre Pékin et Londres annoncés par le chancelier de l'Échiquier George Osborne, à l'occasion d'un forum à Hongkong ». John Lipsky du FMI affirmait que le yuan doit être plus largement utilisé dans le monde avant d'intégrer les droits de tirage spéciaux (DTS), l'unité de compte du Fonds monétaire international (FMI). On peut dire que ce processus est désormais en bonne voie. Aussi Julia Leung, Vice-directrice de la Hongkong Monetary Authority (HKMA), peut-elle dire : «Nous assistons à la naissance d’une nouvelle monnaie de réserve mondiale et nous en sommes la sage-femme.»
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