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Contre le soutien de la Banque Mondiale à la privatisation de l'éducation : communiqué de presse

NB: Bv lire et diffuser

Communiqué de presse - 14 mai 2015

Nairobi, Kampala, Washington, Yaoundé

Aujourd'hui, plus de cent organisations nationales et internationales à travers le monde ont publié une déclaration conjointe adressée au président de la Banque mondiale, Jim Kim. La déclaration exprime leur profonde préoccupation au sujet du soutien de la Banque mondiale à l’entreprise « Bridge International Academies »(BIA),une chaîne multinationale d’écoles primaires privées « low-cost » à but lucratif ciblant les familles pauvres au Kenya et en Ouganda. La déclaration commune constitue une réponse à un discours récent du président de la Banque mondiale, Jim Kim, qui avait à cette occasion fait l’éloge de BIA en tant que solution pour réduire la pauvreté.

Avec des signataires qui comprennent des organisations communautaires, nationales, et internationales, ainsi que des réseaux et les syndicats représentant des milliers d'organisations et des millions de personnes sur les cinq continents, la déclaration reflète un mouvement mondial croissant de défiance à l’égard des politiques de soutien à l'enseignement privé dans les pays en développement. La déclaration a été rédigée et signée par 30 organisations en Ouganda et au Kenya, qui sont les pays principalement concernés par la politique de la Banque mondiale, et elle a reçu le soutien supplémentaire de 116 organisations.

BIA utilise des méthodes d'enseignement hautement standardisées, des enseignants mal payés sans formation et des stratégies de marketing agressives pour cibler les ménages pauvres, en misant sur leur aspiration à une vie meilleure pour leur vendre ses services. Selon un résident de Mathare, un des bidonvilles les plus anciens de Nairobi, où se trouve une école BIA :

« Bridge, ils viennent ici, mais ils ne comprennent pas comment les choses fonctionnent. Ils ne travaillent pas avec les autres écoles, avec la communauté. Ils font juste du porte à porte pour vendre leur produit. » 

Néanmoins, la Banque mondiale a investi 10 millions de dollars dans BIA, tandis qu’elle n'a aucun investissement en cours ou prévu dans l’enseignement public en Ouganda et au Kenya.

Dans son discours prononcé en Avril, Jim Kim avait affirmé que pour les élèves de BIA, « les scores moyens en lecture et en mathématiques sont bien supérieurs de ceux des élèves de l’enseignement public ». Pourtant, la source des données citées par Jim Kim n'a pas été divulguée par la Banque mondiale, et il semble que ces chiffres sont tirés directement d'une étude réalisée par l’entreprise Bridge International Academies elle-même.

Le président de la Banque mondiale avait en outre déclaré que «le coût par étudiant d’un élève à Bridge Academies est de seulement 6 dollars par mois ». Cette suggestion que 6 dollars est une quantité acceptable d'argent pour les ménages pauvres révèle une profonde incompréhension de la réalité de la vie des personnes les plus pauvres. Les organisations kenyanes et ougandaises ont calculé que pour la moitié de la population au Kenya et en Ouganda, une dépense de 6 dollars par mois et par enfant pour envoyer trois enfants en âge d’aller à l’école primaire dans une Bridge International Academy leur coûterait au moins un quart de leur mensuel – pour des familles qui ont déjà des difficulté à assurer trois repas quotidiens à leurs enfants.

En outre, le coût total réel de l'envoi d'un enfant dans une école BIA est en fait plus probablement compris entre 9 et 13 dollars par mois, et jusqu'à 20 dollars en incluant les repas scolaires. D'après ces chiffres, l'envoi de trois enfants dans une école BIA représenterait de 68% (au Kenya) à 75% (en Ouganda) du revenu mensuel de la moitié de la population dans ces pays.

 Salima Namusobya, la directrice de l’Initiative for Socio-Economic Rights, une organisation ougandaise signataire de la déclaration commune, a déclaré:

« Si la Banque mondiale veut véritablement accomplir sa mission, qui consiste à œuvrer pour que chaque enfant puisse accéder à une éducation primaire de qualité quel que soit le revenu de sa famille, elle devrait promouvoir, dans un contexte comme l’Ouganda, la gratuité du système éducatif. »

Le discours de Jim Kim est a été prononcé peu de temps après qu’une délégation de membres de la société civile de plusieurs pays, dont l'Ouganda, ont rencontré des responsables du secteur de l'enseignement de la Banque mondiale pour discuter spécifiquement de son soutien aux écoles primaires privées payantes à but lucratif, notamment à BIA.

Il survient également à un moment où l’on observe une augmentation sans précédent du financement public de l'enseignement privé à travers le monde, notamment en Afrique, souvent avec le soutien d’investisseurs étrangers. Ces investissements ont généré de nombreuses critiques, comme dans un récent rapport mettant en exergue la façon dont le gouvernement du Royaume-Uni, par l'intermédiaire de son Département pour le développement international (DfID), soutient la privatisation de l'éducation et des services de santé dans les pays en voie de développement. DfID est aussi un investisseur de Bridge International Académies.

La déclaration commune appelle notamment la Banque mondiale à cesser de promouvoir et d'investir dans Bridge International Academies ou d’autres écoles privées primaires et secondaires payantes, et de soutenir le développement d’un enseignement public, gratuit, et de qualité, tel qu’il est stipulé par les lois en vigueur au Kenya, en Ouganda, et dans d'autres pays.

Notes

La compagnie BIA est soutenue entre autres par Bill Gates, Mark Zuckerberg, Pierre Omidiya, et l’entreprise internationale d’édition Pearson. Elle opère au Kenya et en Ouganda, et projette d’investir au Nigeria, en Inde, et dans d’autres pays. Elle compte maintenant près de 120 000 élèves inscrits dans plus de 400 écoles.

Documents

 

                                 Le Secrétaire Général du SNAES

                                       Roger KAFFO FOKOU

Press release - 14 May 2015

 Nairobi, Kampala, Washington DC, Yaoundé

Today, more than one hundred national and international organisations across the world released a joint open statement addressed to the president of the World Bank, Jim Kim. The statement expresses their deep concerns about the World Bank’s expressed support for the development of a multinational chain of low-fee profit-making private primary schools targeting poor families in Kenya and Uganda, Bridge International Academies (BIA). It comes as a response to a recent speech of the president of the World Bank, Jim Kim, who praised BIA as a means to alleviate poverty.

With signatories including community-based, national, and international organisations, as well as networks and trade unions representing thousands of organisations and millions of individuals in five continents, the statement reflects a growing global movement questioning policies in support for private education in developing countries, including from the World Bank. The statement was written and signed by 30 organisations in Uganda and Kenya, which are the countries primarily affected by the World Bank policy, and received the additional support of 116 organisations.

BIA uses highly standardised teaching methods, untrained low-paid teachers, and aggressive marketing strategies to target poor households, building on their aspiration to a better life to sell them its services            .According to a resident of Mathare, one of the oldest informal settlements in Nairobi, where BIA operates:

“Bridge, they come here, but they don’t understand how things work. They don’t work with other schools, with the community. They just come from door to door to sell their product.”

Nevertheless, the World Bank has invested 10 million dollars in BIA, while on the other hand it has no active or planned investments in either Kenya or Uganda’s public basic education systems.

In his speech delivered earlier in April, Jim Kim claimed that that “average scores for reading and math have risen high above their public school peers” in Bridge International Academies. Yet, the source of the data quoted by Jim Kim has not been disclosed by the World Bank, and it appears to have been taken directly from a study conducted by BIA itself.

The World Bank president further stated that “the cost per student at Bridge Academies is just $6 dollars a month”. This suggestion that $6 is an acceptable amount of money for poor households to pay reveals a profound lack of understanding of the reality of the lives of the poorest. Kenyan and Ugandan organisations have calculated that for half of the population in Kenya and Uganda, spending $6 per month per child to send three primary school age children to a Bridge Academy would cost at least a quarter of their monthly income – whereas these families are already struggling to be able to provide three meals a day to their children.

Moreover, the real total cost of sending one child to a Bridge school may in fact be between $9 and $13 a month, and up to $20 when including school meals. Based on these figures, sending three children to BIA would represent 68% (in Kenya) to 75% (in Uganda)of the monthly income of half the population in these countries.

Salima Namusobya, the Director of the Initiative for Socio-Economic Rights, a Ugandan organisation that also signed the joint statement, said:

If the World Bank is genuine about fulfilling its mission to provide every child with the chance to have a high-quality primary education regardless of their family’s income, they should be campaigning for a no-fee system in particular contexts like that of Uganda.”

The speech from Jim Kim came shortly after members of civil society from several countries, including Uganda, met with senior education officials of the World Bank specifically to discuss its support for fee-charging, private primary schools, and funding for BIA in particular.

It also comes at a time where there is an unprecedented increase in financing of private education across the world, especially in Africa, often with the support of foreign investors. These investments have attracted equally growing criticism, including in a recent report highlighting how the UK government, via its Department for International Development (DfID), supports privatising education and health services. DfID is also an investor in Bridge International Academies.

The organisations’ statement calls on the World Bank in particular to stop promoting and cease investing in Bridge International Academies and other fee-charging, private providers of basic education, and instead to support the free, public, quality education which the laws applicable in Kenya, Uganda, and other countries require.

Notes

BIA is backed by Bill Gates, Mark Zuckerberg, Pierre Omidiya, and multinational publishing company Pearson, among others. It operates in Kenya and Uganda, with plans to invest in Nigeria, India and other countries. It now has close to 120,000 pupils enrolled in more than 400 schools.

Documents

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The Secretary General of SNAES

Roger KAFFO FOKOU



14/05/2015
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