Le Brexit à chaud : les leçons que l’on doit en tirer au plus vite
Le Royaume-Uni vient de quitter l’Union Européenne. Tout le monde est d’accord là-dessus, c’est un événement majeur de ce début de XXIè siècle. Il marque indiscutablement l’échec de la politique de construction de cette grande et potentiellement très puissante entité du champ stratégique mondial. C’est une évaluation sans appel de cette politique et de la vision de ceux qui l’ont jusqu’ici élaborée et mise en œuvre.
L’utopie européenne n’est sans doute pas en cause ici, mais sa mise en œuvre est jusqu’ici perçue comme un échec fracassant. La faute n’en incombe pas uniquement aux politiques européens : elle est aussi le fait d’une mondialisation néolibérale forcenée et obtuse, qui se sert des marchés et de l’impuissance des hommes politiques pour spolier les citoyens de tous les pays de leurs droits sociaux et économiques, et les jeter dans la misère. Cet échec est aussi celui de toutes les élites, et en premier lieux des élites intellectuelles et culturelles que le marché a circonvenues pour les uns, stipendiées pour les autres, réduites au silence et ostracisées pour les plus lucides. Ces élites, pour la plupart, se sont obstinées à sermonner les peuples, - ventres affamés n’a point d’oreille, c’est pourtant bien connu – utilisant à mauvais escient leurs capacités intellectuelles, alors qu’il serait beaucoup plus salutaire pour la mondialisation actuelle qu’ils ramènent à la raison les élites politiques et les puissances du marché.
Après le brexit et la panique instinctive qui en a résulté, un certain calme va se construire, par tous les moyens : propagande, interventionnisme monétaire… Mais à long terme, ni le Royaume-Uni, ni l’Europe, ni ce siècle, ne seront plus les mêmes. En écoutant les responsables européens, surtout ceux qui sont aux affaires, il me semble qu’ils ne saisissent pas que l’une des clés de la construction européenne se trouve hors d’Europe, entre les griffes puissantes des marchés financiers qui évoluent sur un plan supranational. Si le néolibéralisme n’est pas rapidement ramené à une mesure plus humaniste, plus compatible avec les intérêts et les aspirations des peuples et des citoyens, l’édifice européen se bâtira en vain. Et l’Union Européenne ne sera pas alors la seule victime, avis aux Etats-Unis d’Amérique, où les questions sociétales dessinent déjà des lignes de fractures que les extrêmes, le moment venu, n’auront qu’à exacerber. Et si l’Union Européenne échoue, les pays d’Europe verront leurs places dans la mondialisation en cours se rétrécir considérablement, et le chaos pointer à l’horizon. L’aube des barbares se signale, comme à la veille de la chute de l’Empire romain d’Occident en 475 après J.C. Si les barbares emportent la citadelle, le monde peut aborder une nouvelle ère d’agitation et des ténèbres.
Roger KAFFO FOKOU
Ecrivain essayiste et poète
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