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Les marchés attaquent Sarkozy : quand les événements justifient nos analyses

Dans un article mis en ligne le 9 janvier 2012 et intitulé « De Sarkozy à Merkel : ces dirigeants dont les marchés vont tout faire pour se débarrasser démocratiquement », nous montrions déjà en quoi M. Sarkozy, que beaucoup considèrent naïvement comme de la droite libérale en raison de l’admiration de ce dernier pour l’Amérique, est en fait une des bêtes noires des marchés. Cela n’en fait pas un ami pour nous, soit. «  Qui est Nicolas Sarkozy ? Quelle est sa vision du monde ? En scrutant la scène par cette lucarne-là, écrivions-nous, il est possible d’avoir un aperçu de quelques-unes des raisons sans doute parmi les plus profondes pour lesquelles une victoire de l’actuel locataire de l’Elysée en 2012, tout en se situant très loin de la catastrophe que représente déjà le plus que probable retour de Vladimir Poutine au Kremlin, ne fera pas véritablement l’affaire des forces du marché ». Cette analyse-là, point par point, se confirme et, ne faisons pas la fine bouche, félicitons-nous-en. Vladimir Poutine est revenu au Kremlin et nous avons vu les marchés hurler. Les meubles semblaient pouvoir être encore sauvés jusqu’à hier 12 février en France et soudain, patatras ! un sondage dévisse, obligeant les marchés à enlever leur loup en plein bal masqué pour ne pas dire carnaval…


En effet, tant que Sarkozy courait désespérément après les sondages, tout allait pour le mieux et il suffisait de dire et redire aux Français à quel il était impopulaire. C’était à croire que ce n’était pas auprès des Français que Sarkozy l’était, tellement les médias s’appliquaient à le rappeler à ces derniers. Le vendredi 9 mars, Le Monde est allé plus loin en titrant : «Sarkozy, le moins populaire des dirigeants européens » M. Sarkozy mérite-t-il notre compassion ? Je ne le crois pas : comme tous les politiciens, il est un prédateur, et certainement l’un des plus féroces de ce landernau-là (lire l’article « Spontanéité, lapsus et révélations chez les hommes politiques : Biya, Sarkozy, Bayrou et Obama »). Nombre de ses valeurs profondes, qu’il masque soigneusement, doivent être très discutables. Il a choisi de faire cette campagne 2012 en France sur des thèmes populistes, dans un langage populiste. Parce qu’il est un politicien lucide, madré et que, ayant constaté qu’il a déjà perdu les médias, les intellectuels et les hommes de culture, comme tous les politiciens avant lui, il a choisi de s’adresser prioritairement à ceux qui peuvent encore être conquis (les masses dites populaires), dans le langage que ces dernières peuvent comprendre. Et apparemment cette stratégie serait en train de payer, semant d’abord le doute, puis de plus en plus de la panique dans le camp des adversaires de M. Sarkozy.


Tout commence le 8 mars lorsque deux spécialistes des mathématiques donnent M. Sarkozy vainqueur au second tour. On a ainsi pu lire sur Le Figaro.fr : « Deux universitaires français ont mis au point une méthode de calcul qui permettrait de déterminer le vainqueur de la prochaine échéance électorale. Ayant déjà prédit le résultat de plusieurs élections, ils annoncent la victoire du président sortant ». Ce premier couac installe un début de fébrilité mais pas trop chez les anti-sarkozystes : les maths, on s’en fout. Qu’est-ce que le peuple y comprend de toutes les façons ? Pas grand-chose. Le 12 mars, comme un malheur ne vient jamais seul, les choses se compliquent : un sondage ifop donne Sarkozy en tête des intentions de vote au premier tour pour la première fois. Hollande accuse sportivement le coup et annonce une réaction vigoureuse de sa campagne. Pour les marchés, c’est nettement la panique qui semble se produire. Celle-ci se manifeste de deux façons le 13 mars : un nouveau sondage, ou plutôt un contre-sondage, est vite produit (TNS-Sofres) qui rectifie précipitamment les choses pour faire repasser Hollande en tête, de 4 bons points. Ouf ! (N’empêche qu’il faudra bientôt – je m’avance un peu mais j’en prends le risque – réfléchir sur le rôle et l’indépendance des instituts de sondage exactement comme cela est en train de se faire pour les agences de notation.) Pour faire bonne mesure, et se servant de ses voix emblématiques, le marché décide de contre-attaquer.


Déjà une semaine avant (époque des analyses maths), le Times magazine avait déjà publié un article dans lequel Sarkozy était présenté comme un cynique désespéré (« Si tout cela donne l'impression que Sarkozy imite Marine Le Pen, c'est parce que c'est le cas (Admirez la rhétorique !). Beaucoup interprètent ces nouvelles attaques envers l'immigration comme une volonté cynique et désespérée de recruter de nouveaux électeurs »), un fils de Hongrois qui parle d’immigration : « Cela ne sonne-t-il pas un peu hypocrite venant d'un fils d'immigré hongrois, qui a même à une époque brisé un tabou français en évoquant la discrimination positive ? Peut-être, mais en cette période de pression électorale, le très impopulaire Sarkozy n'aura peut-être pas le luxe de renoncer à sa stratégie douteuse mais gagnante de 2007 qui consistait à faire les yeux doux à l'extrême droite ». De quoi réveiller le sentiment xénophobe des petits amis de Marine (Et ils ne sont pas peu nombreux par ces temps de crise aiguë) aux dépens de Sarkozy. Rien à faire, la remontée de Sarkozy des enfers des mauvais sondages se poursuit. Le 13 février, le Wall Street Journal laisse tomber le masque et se rue sur Sarkozy : «  Même en France, écrit ce journal,  on voit rarement plus cynique que ça ». Et d’ajouter, emphatique : « C'est une position odieuse, non seulement parce qu'elle s'appuie sur des sentiments détestables mais aussi parce que c'est un exemple parfait d'ignorance économique ». Qui sont Le Time magazine et le Wall Street journal ?


Le Time Magazine fait partie du géant américain des médias Time Warner, 280 milliards de capitalisation en 2000. Dans le capital de ce mastodonte qui couvre tous les secteurs des médias sur tous les continents, vous trouverez tout ou presque ce qu’il ya d’important dans la finance des affaires aux Etats-Unis ou au-delà : Capital Research Global Investors 6,49 %, Dodge & Cox Inc 5,24 %, T. Rowe Price Associates 4,25 %, Growth Fund Of America Inc 3,92 %, The Vanguard Group 3,54 %, State Street Corporation 3,41 %, AXA 3,20 %, Dodge & Cox Stock Fund 3,00 %, JPMorgan Chase 2,89 %, The Capital Group Companies 2,86 %, BlackRock Institutional Trust Company, N.A. 2,50 %, FMR LLC 2,37 %, Investment Company Of America 1,16 %, Vanguard Total Stock Market Index Fund 1,05 %... Quant au Wall Street journal, comme son nom l’indique, il est la bible de l’une des plus importantes places financières du monde. Racheté par le groupe News Corporation de Rupert Murdoch pour 5 milliards de dollars début août 2007, Il est le quotidien économique et financier le plus vendu au monde. L’actionnariat du WSJ est tout aussi marqué par le monde de la finance des affaires : on y retrouve, en plus Murdoch et d’un certain John Malone dont personne ne sait rien, Citigroup, capital research & management, FMR corp, Goldman Sachs, JP Morgan, Meryll Lynch, Morgan Stanley et State Street Corp. C’est dire que lorsque Le Time magazine ou le Wall Street Journal prennent une position sur un sujet, ils expriment les positions du grand capital, et il n’est pas surprenant que les deux positions, comme sur l’élection présidentielle française, se superposent rigoureusement.



14/03/2012
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